dimanche 27 août 2017

Etape 32 Malaucène- Volx - Mont-Ventoux par Bédoin ; dimanche 27 août 2017


Distance
129km
Dénivelé
2495m
Durée de pédalage
8h49
Moyenne
14,6Km/h
Col
Col de la Madeleine (448m), Mont-Ventoux (1911m)
Département(s)
Vaucluse (84), Alpes-de-Hautes-Provence (04)
Région(s)
PACA

Mont Ventoux

Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux




Direction Bédoin


Je m’en faisais une montagne et ce n’était qu’une colline.
A côtoyer les mythes, on finit iconoclaste.

Mais par où monter au Mont-Ventoux ?
3 choix s’offrent à vous : Malaucène, Bédoin et Sault.
Et pour moi, de Malaucène, il en reste 2 : par Malaucène direct, ou via Bédoin.
J’ai décidé que je ferai l’ascension par le coté réputé le plus difficile, c’est à dire par Bédoin. Lorsque l’on s’attaque à un mythe il ne faut pas jouer petits bras. Il faut savoir ce qu’il en est réellement.
Giant ToughRoad JAG en se dirigeant vers le pied du Mont Ventoux
Donc, de Malaucène, je pars en direction de Bédoin par une jolie petite route empruntant le col de la Madeleine. Au fur et à mesure que je m’élève, le paysage devient plus sympathique. Comme souvent. La vie est toujours plus belle vue d’en haut. Nos problèmes deviennent plus petits. On oublie, pour un temps, la logistique, les détails, et toutes leurs petites contrariétés, pour embrasser une vision plus globale, plus dégagée, plus respirable.
A Bédoin, c’est la cohue.
Le tourisme cycliste bat son plein en cette fin de mois d’août. Aujourd’hui, je provisionne un peu car on m’a dit que je ne trouverai pas à manger ou à boire durant cette montée ; alors, vu que tout le monde crie à hue et à dia que cette ascension est très dure, voir que c’est plus la difficile que peut rencontrer un cycliste au cours de sa vie, je fais, une fois n’est pas coutume, quelque provisions afin d’assurer mon déjeuner. En fait, je fais le plein de vivres comme si devais pourvoir au ravitaillement d’une colonie de vacances pour 1 semaine. 2 Bouteilles d’eau, fromage blanc, banane, gâteaux, fougasse, … Tout y passe. Je dévalise un magasin d’alimentation. Comme quoi, la rumeur ambiante ne laisse pas indifférent. Mon inconscient impacté par ce sournois matraquage travaille sans le savoir contre moi (le poids, cet ennemi) en refusant l’idée d’une journée, annoncée difficile, sans repas. A la finale, mon vélo, ce n’est plus un vélo, c’est un camion de livraison. J’ai vu beaucoup trop gros et mes sacoches ne peuvent accepter toutes ces victuailles. Je fixe comme je le peux tout ce bazar sur mon porte-bagage, haut-dessus de ma tente grâce à mes tendeurs ; ça commence à faire sérieusement camping-caravaning paré pour la grande transhumance à la Baule mon histoire... Bon, voyons le côté positif de cette dérive alimentaire, de cette peur de manquer : avec tous ces kilos supplémentaires, je suis paré pour l’hiver. Ainsi lesté, je peux donc maintenant commencer à monter les 23 kilomètres du Mont-Ventoux.
Le Mont Ventoux de loin

Allez, action.
Et c’est parti. Je sors de Bédoin. La montée est douce pour le moment. Tout en pédalant, j’observe le Ventoux. On se toise. La pente du Ventoux, que je peux contempler tranquillement dans cette phase d’approche, ressemble à un toit à rupture de pente : très pentue dans sa plus grande partie jusqu’au sommet (la faitière), puis très aplatie vers le bas (la gouttière). Je pédale toujours paisiblement dans la partie douce. Et puis, après le septième kilomètre, un virage à gauche. Et là, juste après, à la sortie du virage, l’ascension démarre réellement. A compter de cet instant mon compteur indiquera majoritairement, et durant 9 kilomètres, du 9% régulier avec quelques petits passages à 10%. Arrivé au lieu dit du Chalet Reynard on se calme et on repasse sur du 7% durant le 7 derniers km.
Giant ToughRoad, l'ascension du Mont Ventoux
Vers 1000m, un abris


Giant ToughRoad, l'ascension du Mont Ventoux

Giant ToughRoad, l'ascension du Mont Ventoux


Bilan de la montée ? Ça ne casse pas 3 pattes à un canard, et ce n’est en aucun cas conforme au mythe. Les mythes sont souvent décevants. C’est ainsi.

Le Ventoux est une ascension beaucoup moins violente que les cols Alpins car ici, il n’y a pas de gros pourcentages (>10%) dans lesquels vous craignez de vous manger vos rotules. Nous somme face à une montée qui est certes forte, 9%, mais qui a surtout la particularité d’être assez longue (une petite vingtaine de kilomètres de montée effective) et très régulière. Il n’y a pas de répit. Pas de petit morceau de plat ou de descente pour récupérer. Jamais le pourcentage ne baisse. C’est du 9% constant.
Et pour mon rythme de tracteur, c’est parfait. Je suis encore dans ma zone de « confort » en termes de pourcentage, et cette montée  régulière me permet de prendre mon rythme de semi-remorque sans forcer outre mesure.
Pour preuve, lorsque j’arrive au Chalet Reynard et que la partie la plus difficile est terminée, je ne suis pas encore fatigué ; et à partir de là, les pourcentages diminuent. Bien qu’ayant monté sur un rythme honorable, je me dis que j’ai dû trop m’économiser. Je décide donc de hausser un peu le rythme. Et à cet instant, 2 cyclistes Allemands tout de verts vêtus, me doublent. J’accélère, je force, je m’accroche et je les rattrape avec mon poids lourds. Je sens que ça les agace un peu de se faire coller par un vélo de grand-mère avec de si grosses sacoches. Alors, les fourbes de Teutons haussent subrepticement le rythme, jetant de temps à autres de furtifs coups d’œil en arrière pour voir si je suis encore là. Ah, que c’est moche l’espionnage… Et de nouveau, on rejoue 1870. Je donne tout ce que je peux, je chante la Marseillaise, Allons enfants de la patri-i- e, je hisse drapeau sur le porte bagage, j’appelle Jeanne d’Arc à la rescousse. Bref je fais tout. Ce que je peux.  Mais la puissance militaire Allemande, vous la connaissez, hein ? Et elle finit par me submerger. C’est Waterloo. Je décroche, la mort dans l’âme et le cœur en sur régime. Les jambes me brulent. La chimie de guerre Allemande (là, on passe en 1914), sans doute… Ils ne reculent décidément devant rien ces Schpountz. Je capitule. Pour le coup, là, j’ai forcé. Et je suis atteint. Je le paierai dans le dernier kilomètre au dénivelé plus important.
Il faut que je le confesse. Durant toute cette montée, je n’ai pu doubler personne avec mon tracteur. Enfin, si ; ceux qui étaient arrêtés. Je me suis toujours fait doubler en fait. Mais je suis monté élégamment, genoux bien parallèles au cadre, sans souffler comme un bœuf, et souvent debout, dans un joli (enfin j’espère) mouvement de danseuse bien souple. Aujourd’hui, j’étais en forme.
Que ce soit à la montée, au sommet, ou à la descente (à Mach 12, car en descente j’ai quelques beaux restes) mon vélo a fait sensation. Certains, même, en montée me prédisent que « ça ne passera pas avec tout ce poids ». Je laisse causer ces petits bras… Et je pédale...

Maintenant une remarque générale sur le cyclisme et une remarque particulière sur le cyclisme autour du Mon-Ventoux.
Le cyclisme est une activité d’extérieur. C’est avant tout une promenade dans la nature. C’est le plaisir d’observer, de respirer (et avec les pots d’échappement des mazouts, je peux vous assurer que l’on est souvent bien servi), d’admirer, de penser.
Alors naturellement, le cycliste appréciant, profitant, se délectant de l’environnement, on pense que le cycliste protège ce qu’il aime et ce dont il jouit.
Et bien aujourd’hui, ici, au Mont-Ventoux, j’ai été dans l’obligation de revoir ce genre de raisonnements simplistes.
Aujourd’hui j’ai eut honte d’être cycliste tant les bas côtés de la route étaient couverts d’emballages dont l’origine ne faisait aucun doute : c’était « Power truc », « machin Bull » et compagnie. Tous les déchets de cyclistes crado qui craignent : 1) de ne pas pouvoir monter s’ils n’ont pas leur cochonneries d’alimentation censée les doper, 2) d’être trop lourd si d’aventure ils avaient l’idée saugrenue de conserver dans leur poche de maillot l’emballage vide de leur cochonnerie une fois qu’ils l’on avalée. Alors ils balancent par la fenêtre… Comme dans leur voiture. Pour être plus léger sans doute ?
Alors je pose la question : ma grand-mère qui faisait du vélo tous les jours se nourrissait-elle de ces saloperies hors de prix, de ces choses dites énergétiques pour cyclistes mous du bout ? Non. Et pourtant ma grand-mère faisait certainement plus de kilomètres dans l’année que tous les « Mont-Ventoux Finisher » qui balancent leurs déchets par terre. Cyclistes et autres amoureux du sport et de la nature, arrêtons de consommer toutes ces saloperies inutiles que la publicité essaye de nous fourguer à prix d’or. Restons simple : eau,  fromage, fromage blanc, fruit et basta. Vous pouvez même vous envoyer des cotes de porc. Tiens, je me rappelle d’une émission sur les premiers tours de France ou il était précisé qu’un coureur, alors célèbre, mangeait durant chaque étape, 17 côtes de porc qu’il emmenait dans sa besace. Emmenez donc des cotes de porc empaquetées dans un torchon et arrêtez avec vos cochonneries entourées d’une multitude d’emballages. Précisons que ces coureurs n’avaient pas une myriade de voitures d’assistance qui les suivaient. Ils étaient autonomes, emmenant, croisés telles des cartouchières sur leur torse, pneus et chambres à air de secours. Ils faisaient un Tour de France 2000km plus long que celui de nos jours, sur des routes non bitumées, avec des vélos lourds qui, lorsqu’ils en étaient équipés, avaient un nombre de vitesses ridicules. Serions-nous à ce point devenus des demi-portions qu’il nous faille tout un tas de trucs très polluant pour réaliser 50% de ce que faisaient nos ainés ?
Mais le Mont-Ventoux est une sorte de grand supermarché du cyclisme. Et vous avez-vu la saleté des parkings de supermarchés ? On trouve donc au Mont-Ventoux tout ce que nos économies de marché peuvent produire de pire : égoïsme et destruction des biens communs.
Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux

Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux

Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux



Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux

Giant ToughRoad JAG au sommet du Mont Ventoux


 Le sommet du Mont-Ventoux menace de s’effondrer tant il y a du monde. C’est blindé ici. C’est la surpopulation. 7 milliards d’humains se sont donnés rendez-vous aujourd’hui pour admirer le panorama. Et on frise le délire commercial. Il y a même des tours opérateurs cyclistes qui montent avec camions et remorques pour assurer une maintenance de proximité à leurs « clients ». Service royal au prix d’une débauche de pollution. Celui-là, le chérubin, redescendra en camion, celui-ci, l’incapable, à besoin d’un mécano, l’autre là-bas a faim et n’a pas amené son alimentation avec lui, trop lourd : bref tout un univers d’assistés se concentre au sommet.

Mais, comme partout la population est diverse. Et il ne faut pas se focaliser ni sur les plus nombreux, ni sur les plus bruyants, ni sur les plus polluants. Il y a quelques fous avec de jolis rêves plein la tête. Tiens, on m’interpelle : « Comment de kilos le vélo ? » Et puis la discussion s’engage et le lascar m’apprend un truc intéressant : Il en est à sa deuxième montée de la journée, par Bédouin d’abord, par Malaucène ensuite, et il va se faire un allez et retour à Sault afin d’assurer la 3ème montée. Carrément balèze. Il fait partie du « Club des cinglés du Mont-Ventoux » qui se charge d’homologuer ce genre d’exploit : 140km avec 4400m de dénivelé dans la journée, voilà qui force le respect. Là le Ventoux prend toute sa dimension. Voilà un beau défi qui va me permettre d’alimenter mes rêves...

Si je n’ai pas éprouvé de difficulté particulière lors de cette ascension pourtant mythique, il y a quelques raisons.
Aujourd’hui j’avais la forme. J’étais bien sur mon vélo. C’est probablement le bienfait de ma journée de repos d’hier. De plus, la météo était idéale : 35-36° constant sur mon compteur, ciel voilé, pas de vent. On est très loin de mon passage au Galibier avec ses 90km/h de vent de face, la pluie, le grésil et les 6°. De plus, le genre de montée régulière du Mont-Ventoux me convient bien. Il n’y a pas d’à-coup, pas de murs difficile, rien. Parfais pour moi, je peux prendre un rythme régulier et monter tranquillement. Et puis, mon vélo est une vraie mule : obstiné, costaud, constant, il me monte partout. Il ne semble pas possible de l’arrêter. Il passe doucement mais partout. Son braquet de 28X36 a été parfait pour cette ascension. Et puis, il y a un autre élément important. Je suis en fin de vacances, donc au summum de ma force. Car n’ayant pas d’activité physique au cours de l’année, je commence l’entrainement pendant mon voyage. Alors forcément, à la fin, la forme progresse, mon poids régresse, et tout va pour le mieux. Et le poids du vélo n’est pas un réel problème. Il y a certes quelques inconvénients, on monte moins vite et on ne peut pas lâcher les mains du guidons, mais il y a aussi des avantages : on a des vêtements chauds pour les descentes et on peut dévaliser les magasins d’alimentation pour la montée du Mont-Ventoux… Et puis à ce niveau de poids, 42kg vélo chargé, on peut rajouter 5kg sans percevoir une quelconque différence.

Je profite un peu de la vue du sommet du Mont-Ventoux, et puis je fuis la surpopulation et je redescends vers Sault. Je préfère nettement les paysages de ce coté, et la ville de Sault me charme. Je me promets d’y revenir prochainement. J’avais prévu de planter ma tente dans les environs, mais aujourd’hui, je suis franchement en forme, alors je continue. Et je me régale encore des magnifiques paysages de cette partie Est du Vaucluse, et des Alpes-de-Haute-Provence. Je finis de nuit, c’est devenu une habitude, dans un endroit particulier dont je vous parlerai demain.

Car il est tard.
Et ce coup ci, je suis fatigué.
Alors bonne nuit et à demain.

En descend vers Sault


Sault

Giant ToughRoad JAG au pied du Mont Ventoux, à Sault
Sault

Sault

Simiane-la-Rotonde







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