jeudi 10 août 2017

Etape 20 Besançon – Dijon ; jeudi 10 août 2017


Distance
100km
Dénivelé
800m
Durée de pédalage
6h04
Moyenne
16,5Km/h
Département(s)
Doubs (25), Haute-Saône (70), Jura (39), Côte-d’Or (21)
Région(s)
Bourgogne-Franche-Comté


Pesmes sous de menaçants nuages











Ah, si la Côte d’Azur  agonise sous la canicule, moi j’aurai eut froid durant ces vacances d’été cyclistes. 14° pour un Niçois c’est un peu comme des vacances dans un Goulag en Sibérie. Je caille.  Mais il ne pleut pas, donc tout va (encore) bien. Je roule au milieu des champs. Peinard. Si on aime rouler à 7km/h et mettre 14h pour faire 100km. Voyons le bon côté des choses : c’est beau, ça sent bon, je suis ABSOLUMENT seul, au calme, je n’entends pas le moindre bruit de voiture, je ne sens aucune fumée nauséabonde. Peinard. Au milieu des champs. Sur de vagues chemins qui n’ont pas dû être utilisés depuis 1927. J’aurai dû installer une débrousailleuse à l’avant de mon vélo. Ça aurait grandement facilité ma progression.
 A 5h30 ce matin, au petit jour, j’étais décidé à en finir définitivement avec mon fourbe SmartMachin Sud Coréen. J’étais là, debout, au milieu du pont de la République à Besançon encore désert à cette heure matinale. Solennel, bien droit, je tenais ce perfide appareil à bout de bras, bien au dessus du Doubs que je soupçonnais profond à cet endroit là. Puis, encore une fois, je fus faible. Et il fut rusé. Je me laissais apitoyer. Il me suppliait et je finis par capituler. Trop sentimental pour commander un peloton d’exécution. Il va falloir que je délègue cette opération. Il promettait, arguait qu’il ne pouvait savoir que le tunnel d’hier était boueux, que normalement ce chemin était un fantastique raccourci, que je verrai si je lui laissais la vie sauve, qu’il me ferait voyager par de chemins extraordinaires, qu’il me ferait chanter ma vie en couleur… Qu’il fallait que je lui laisse une autre chance. Pour mon bien.

Et voilà ou me conduit mon sentimentalisme. Au milieu des champs. Chemins praticables car secs. Sinon, je serais déjà à terre comme hier. Mon bras droit, celui qui m’a assuré une belle glissade sous le tunnel, est d’ailleurs fort douloureux. Je ressens chaque cailloux, chaque pierre, chaque trou, chaque bosse avec ce bras dont la peau, malgré ma veste, a été minutieusement limée pour acquérir une belle couleur rose style cochon de lait bien lavé… ou princesse, c’est selon. Ces chemins, magnifiques au demeurant, sont épuisants. Il faut être très attentif pour ne pas finir à terre, je parle désormais d’expérience. De plus ils sont énergivores car non roulants. Ne voulant pas arriver à Noël à Dijon, je décide de changer de stratégie. Je configure Google Maps en mode voiture (en lieu et place
J'adore les châteaux d'eau
de vélo) tout en spécifiant que je ne veux pas emprunter d’autoroute. Alors évidemment, il y a changement de décors et de rythme. Bien que sur des départementales, le bruit revient : Vraoum, Wimm, Zoumm, Tuuut. Les fumées aussi. Et puis la peur, un peu. Mais, j’avance. Le terrain est roulant. Peut-être est-ce comme cela qu’il faut procéder : une moitié d’étape en laissant Google me guider dans des endroits magnifiques mais pas toujours praticables avec mon vélo chargé, et une autre moitié en prenant la main pour augmenter la vitesse moyenne et arriver à bon port.

Dis, c’est encore loin Dijon ? Tais-toi et pédale. Je pédale.
Mais j’ai un satané vent de face depuis que j’ai réussi à m’extraire de mes chemins paradisiaques mis non roulant. Du fait, je pédale, mais pour la vitesse, il faudra repasser. Demain peut-être ? Toujours est-il que ma moitié d’étape hors piste m’a épuisée. Et ce vent est glacial. Je l’ai de face. Il me congèle, me fige sur place. Si à continue, je vais reculer. Car j’ai un coefficient de pénétration dans l’air qui ressemble à celui du 38 tonnes avec mes 5 larges sacoches. Alors le vent s’en donne à cœur joie pour me pousser dans le sens inverse de mon chemin. Et puis je suis un peu froissé de partout. Les douleurs se font plus présentes. Et je crains de me recevoir la colère du ciel sous forme liquide, car dans ma direction, au loin, je vois des tubes noirs et verticaux reliant le ciel à la terre. La bile du ciel. Il doit y avoir comme cela 6-7 tubes (de pluie) très bien dessinés, très distinct. Surtout, passer entre les tubes. 

Dis, c’est encore loin Dijon ? Tais-toi et pédale. Je pédale.
Dijon, place de la République
Et puis j’atteins Dijon. Périphérie à l’abandon, propre mais vétuste composé d’ensembles HLM en décrépitude. Ils sont bas, moins de 8 étages et doivent dater des années 60-70. Et puis un centre ville resplendissant. Toute notre histoire magnifiée (et fantasmée) est concentrée ici : le haut moyen-âge. Dans un état de conservation parfais, propre, rutilant. Je flâne dans les rues piétonnes et je me régale de ce spectacle. Puis, redescendant sur terre, revenant en l’an 2017, je me demande pourquoi notre société change si doucement. Pourquoi acceptons-nous qu’il y ait encore des cerfs et des nobles, pourquoi permettons-nous  (favorisons ?) que certains vivent dans l’extrême pauvreté alors que d’autres s’accaparent les richesses créées par tous ? Peut-on faire communauté avec de tels écarts ? Ne favorise t’on pas plutôt le communautarisme, la guerre entre les communautés ? Ce type de modèle social ne nous condamne t’il pas à vivre dans des sociétés de plus en plus violentes ? Est-ce humainement acceptable ? N’est ce pas incompatible avec le sens de l’histoire, avec l’émancipation de l’humain ? Est-ce compatible avec la devise ornant le fronton de nos mairies Françaises : « Liberté, Egalité, Fraternité » ? Cette Liberté dont nous nous gargarisons n’est-elle pas réservée qu’à une petite Caste possédante et dominante ? La liberté d’accumuler toujours plus, la liberté de s’enrichir sans cesse davantage au dépend de la masse de la population ? Avec l’accélération propre à la société numérique, nous passons de la vitesse de la matière (temps pour déplacer un bloc de roche de 1000 tonnes) à la vitesse de la lumière (numérique). Le travail (humain) est remplacé de plus en plus rapidement par des systèmes automatisés (capital), permettant aux détenteurs des ces nouveaux moyens de production de s’enrichir toujours plus vite, en privant par là-même la capacité de subsistance du reste de la population. Ne faudrait-il pas s’interroger sur « La valeur travail » dont nous aimons tant nous gargariser ? Ce travail (humain) qui se réduit sans cesse. Bien sûr, les possédants répondent en un mot (magique) : propriété. Le droit de propriété. Mais lorsque l’on regarde l’histoire on ne peut être que suspicieux par rapport à ce « droit ». Aux USA, comment la propriété a-t-elle été acquise ? En spoliant, et en exterminant (ce qui est bien plus efficace) les natifs (indiens d’Amérique) qui avaient une gestion communautaires des biens et des ressources. Sur le vieux continent, comment la noblesse a-t-elle acquis ses titres de propriété, ses richesses ? Par la force, en tuant et en pillant. L’origine de la propriété n’est que feu, sang, extermination et injustice. Et c’est ce que l’on a gravé dans le marbre…  

Dis, il est encore loin ce camping ? Tais-toi et pédale.
Je pédale.


A demain.


Pesmes

Pesmes

Pesmes

La Saône





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